BILAN OPA : RECHERCHE D’ENTREPRISES PARTENAIRES

Méthodologie employée

Pour la recherche d’entreprises et/ou d’organisations partenaires, je me suis appuyée sur mon réseau et celui qui m’a été apporté par les membres du Syndicat Potentiel et Marta Caradec qui a souhaité nous aider sur le projet pendant quelques semaines entre mi-janvier et mi-mars.

J’ai ainsi privilégié les entreprises susceptibles d’être intéressées par une démarche artistique et celles au sein desquelles je pouvais bénéficier d’une entrée, d’un appui.

Je suis également entrée en contact avec les organismes professionnels représentant les entreprises et le monde économique afin d’obtenir des relais et des appuis d’une autorité venant de l’intérieur de ce milieu.

J’ai systématiquement appelé les entreprises de mon fichier pour présenter le projet au téléphone dans un premier temps dans la plupart des cas, suivi d’un envoi de mail comportant les documents présentant le projet (plaquette, budget), parfois d’un courrier en fonction des préférences de mes interlocuteurs. Chacun de ces envois a été suivi ensuite d’une relance ou de plusieurs relances pour obtenir un rendez-vous, une réponse.

Les résultats

Au final, j’ai pu avoir 47 réels échanges avec un décideur au sein de l’entreprise (échange téléphonique, de mail et/ou rendez-vous) sur 80 prises de contact.

2 organisations ont contractualisé l’accueil d’un artiste en immersion : ARTE GEIE et son Comité d’entreprise (chaîne de télévision) et GStudio (cabinet d’architectes).

Ont ainsi été immergés cette année 3 artistes :
Marie Bouts, au sein d’Arte GEIE du 21 avril au 16 juin 2008.
Julie Vayssière au sein de Gstudio du 22 au 26 avril 2008 et du 1er septembre au 31 octobre 2008.
Stéphanie Leininger au sein de Gstudio du 20 novembre au 20 décembre 2008.

Sur les 33 entreprises contactées au mois de juillet, 2 se sont déclarées intéressées par l’accueil d’un artiste en immersion en 2009.

Sur l’ensemble des 80 entreprises contactées seules 12 ont définitivement décliné la proposition.

BILAN OPA : DEVELOPPEMENT DES RESEAUX PROFESSIONNELS ET INSTITUTIONNELS

Les réseaux professionnels et institutionnels contactés

Dans le cadre de la recherche tant de subventions que de partenariats afin d’asseoir la démarche et d’augmenter les possibilités d’immersions d’artistes en entreprise, le projet a été présenté à 12 partenaires publics ou réseaux d’entreprises (Admical, CCI Du Bas-Rhin, CCI Sud Alsace,Conseil Général du Bas-Rhin, DRAC Alsace - Ministère de la Culture, Medef du Bas-Rhin, Mission Mécénat - Ministère de la Culture, Ordre Des Experts Comptables, Région Alsace, Société Industrielle de Mulhouse, Ville de Mulhouse,Ville de Strasbourg).

La constitution du groupe de réflexion

Afin de soutenir le projet, le faire connaitre dans les réseaux professionnels et de créer un observatoire de la démarche en cours, j’ai contacté 22 professionnels du monde de l’art ou du monde économique afin de constituer un groupe de réflexion.

Sur les 22 personnes contactées, 14 ont accepté de s’inscrire dans le groupe de réflexion.

BILAN OPA : DIFFICULTES, REPONSES ET POINTS POSITIFS

Les difficultés rencontrées

Lorsque j’ai pu décrocher des entretiens avec certains de mes prospects, j’ai constaté plusieurs difficultés :
. la première est la méconnaissance de la plupart de mes interlocuteurs des formes de création contemporaine autres que la peinture ou la sculpture quand les artistes que je leur proposai d’accueillir utilisent aussi et principalement les outils que sont la vidéo, la performance, les dispositifs participatifs ou les installations ;
. la deuxième consiste à accepter d’accueillir un artiste pour une carte blanche, sans avoir une idée précise au départ de ses éventuelles réalisations ;
. la troisième est la perception d’un sentiment de déception chez certains de ne pas avoir au terme de notre entretien une piste concrète de réalisation au sein de leur entreprise et aussi la perception que de devoir prendre un nouveau rendez-vous pour rencontrer un/des artistes était un nouvel effort à fournir, une étape en trop ;
. la quatrième a été le retour souvent positif, enthousiaste pour ce qui a été perçu comme un projet intéressant, innovant, mais « pas possible » dans l’entreprise de mon interlocuteur avec la suggestion d’aller voir d’autres entreprises « plus adaptées » (plus petites, plus grandes, plutôt des PME, plutôt dans un autre secteur…) ;
. la dernière a été la difficulté à obtenir des réponses claires et définitives de certains interlocuteurs.

Un sentiment général donc d’intérêt pour la proposition mais d’une sorte d’attentisme : « que d’autres se lancent en premier, nous attendons pour voir avant de nous engager. »

Les actions menées en réponse à ces difficultés

Ces premiers constats faits fin février, toute mon énergie a été portée sur le fait de rendre l’action OPA concrète :

. finalisation du blog, mise en ligne des contenus du projet, des bios des membres du groupe de réflexion, et de diaporamas présentant les réalisations des artistes.
. mise en place d’immersions pour alimenter le blog de restitutions et avoir des exemples concrets à montrer à mes interlocuteurs : mise en place d’une immersion en partenariat avec Gstudio, mise en place d’une immersion en partenariat avec le Comité d’Entreprise d’Arte et Arte GEIE.
. proposition aux artistes impliqués dans le projet d’entreprendre un démarchage actif auprès d’entreprises dont le secteur d’activité les inspire particulièrement avec transmission de la méthodologie d’entrée en relation avec d’éventuels commanditaires.

Suite au bilan intermédiaire produit fin juin, des actions ont été menées sur plusieurs points :

Augmentation de la visibilité du projet, opération de communication, amélioration de la lisibilité du blog :
· Edition et diffusion d’un flyer A5 présentant le programme OPA (distribution sur Strasbourg et envoi en France dans les lieux de diffusion artistique ainsi qu’à l’ensemble des réseaux et personnes contactées dans le cadre du groupe de réflexion).
· Mise à jour du blog OPA : Mise en ligne des restitutions hebdomadaires de tous les artistes en immersion. Rédaction d’une page d’accueil statique ciblée vers les entreprises et organisations pour que le blog soit immédiatement lisible.
· Installation des tableaux d’affichage OPA au Syndicat Potentiel (mise en place des lettrages, affichage du 4 pages, accrochage des tableaux blancs).
· Conférence à Mains d’Œuvres, lieu pour l’imagination artistique et citoyenne à Saint-Ouen, 5 octobre 2008.

Adaptation de la méthodologie d’approche des entreprises lors du démarchage :
· Mise à jour de la plaquette OPA pour offrir un cadre contractuel plus souple aux entreprises (durée d’immersion ajustable en fonction de l’artiste et de l’entreprise, pas de minimum de participation au titre du mécénat…).
· Tentatives de plusieurs stratégies de présentation du projet lors des rendez-vous (appui sur le concret réalisé en entreprise et au sein d’organisations par un ou des membres de l’équipe-projet, « quitte ou double » : présentation exhaustive et argumentée en fonction du secteur d’activité d’un seul artiste).

Création d’un événement à destination des acteurs du monde de l’art et de l’entreprise autour de la rencontre de leurs activités :
· Organisation de 3 journées de rencontres-discussions du 16 au 18 octobre 2008 autour des immersions réalisées dans le cadre d’OPA mais aussi d’autres expériences exemplaires (résidence de Marie Reinert aux Archives départementales d’Ille et Vilaine dans le cadre des Ateliers de Rennes et intervention d’Interim-équipe d’artistes au sein d’ARTE GEIE).
Objectifs : présenter les actions réalisées aux prospects, propager la démarche et générer une réflexion collective destinée à être partagée avec l’ensemble des acteurs intéressés par cette problématique.
· Communication sur les rencontres-discussions auprès d’un fichier de 480 contacts : presse locale, régionale, nationale et internet ainsi qu’acteurs identifiés du monde de l’art et de l’économie (institutions culturelles et économiques, personnes relais, membres du groupe de réflexion, ensemble des entreprises contactées…).

Elargissement de la démarche :
· Organisation d’un atelier-formation le 17 octobre 2008 destiné à tout artiste plasticien souhaitant engager des projets en relation avec l’entreprise (faisabilité, conseils, partage d’expériences). Animation de l’atelier en partenariat avec Hélène Mugnier (consultante Art & Entreprise) en présence de Clément Bastien (jeune chercheur en sciences politiques, auteur d’une étude sur la prise en compte de la démarche artistique par le chef d’entreprise et l’entreprise elle-même).

Les succès rencontrés

· Mise en place de 3 conventions d’immersion sur l’année.
· Signature de 2 conventions de mécénat (mécénat numéraire et mécénat de compétences).
· Soutien des 5 institutions publiques sollicitées : DRAC Alsace, Ville de Strasbourg, Conseil Général du Bas-Rhin, Région Alsace, ANPE (aides à l’emploi et de subventions publiques).
· Parution de 2 articles dans la presse papier (DNA du 10 octobre et du 16 octobre 2008) et de 7 articles annonçant les rencontres-discussion d’octobre (presse internet et réseaux sociaux).
· Suivi des rencontres-discussions Quand l’art fait de l’entreprise sa matière par 170 personnes sur 3 jours.
· Publication de 322 articles sur le blog OPA.
· Consultation du blog OPA depuis sa mise en ligne en décembre 2007 au 31 décembre 2008 : environ 10000 visites, 42000 pages vues.
· Constitution d’un réseau de 150 professionnels du monde de l’art et de l’entreprise intéressés par le projet.

BILAN OPA : ELEMENTS DE REFLEXION PERSONNELS

Au terme du développement actif d’OPA (Offre Publique d’Art) des questions se posent, non sur la pertinence de l’immersion d’un artiste au sein d’une entreprise, mais plus sur les modalités de mise en place d’un tel programme.

Artistes en entreprises : un pari impossible ?

Comment se fait-il que sur quarante-sept entreprises auxquelles le projet a été présenté, seules deux d’entre elles aient accepté d’accueillir un artiste en immersion au sein de leur entreprise, leurs locaux, parmi leurs personnels ?

Un chef d’entreprise peut-il assumer le risque de faire intervenir un artiste au sein de son établissement, sans savoir à l’avance ce que celui-ci va produire, si cette production sera de son goût ni même s’il produira quoi que ce soit, éventualité admise par le programme ?

Si la relation entre les mondes de l’art et de l’entreprise « ne va pas de soi » nous dit Clément Bastien, étudiant en sciences politiques qui termine une étude sur « Les investissement des entreprises alsaciennes dans le domaine artistique » commanditée par le Medef du Bas-Rhin, la méconnaissance de l’art contemporain par l’entreprise est-elle un frein à l’immersion d’artistes au sein d’organisations ?

Faire connaître l’art contemporain et ses formes

Il est indéniable, et je l’ai constaté lors de mes entretiens avec des dirigeants, que les formes processuelles produites par l’art contemporain et en interaction avec un spectateur agissant, celles auxquelles recourent les artistes membres de l’équipe OPA, que je présentai à mes interlocuteurs (performances, dispositifs participatifs, actions, modélisations dessinées à partir de données récoltées, films vidéo) n’étaient pas connues d’eux. Ces formes les ont parfois décontenancés mais plus souvent surpris, étonnés, interpelés. Certains ont entrevu des possibilités d’actions avec leurs personnels, d’autres ont craint pour la confidentialité de leurs données, certains y ont vu un moyen d’intervenir sur des problématiques sourdes de leur entreprise, d’autres ont estimé qu’il n’y avait rien à faire d’intéressant dans une usine pratiquant les 3/8, certains se sont dit qu’insuffler de l’art dans le quotidien de leurs collaborateurs ne pouvait qu’être positif, d’autres ont pensé que leurs chauffeurs n’accepteraient pas d’accueillir un artiste dans leur cabine… La plupart a demandé à être tenu au courant « de la suite », des actions réalisées, « pour voir ».

Une médiation autour de l’art contemporain en direction du public des entrepreneurs apparaît donc essentielle. Pour qu’il y ait passage à l’acte, il semblerait qu’il faille que le décideur connaisse l’artiste ou au moins les formes d’art qu’on lui propose d’accueillir mais aussi qu’il parvienne à envisager qu’une expérience artistique puisse se dérouler dans son environnement professionnel. Pour les deux organisations qui ont accueilli des artistes en immersion ces conditions étaient réunies.

Il est compréhensible qu’un futur commanditaire ait besoin d’être rassuré sur le professionnalisme de l’artiste qu’il envisage d’accueillir. Les références d’un artiste, ses publications, sa revue de presse me semblent autant d’arguments à même de convaincre un chef d’entreprise de lui ouvrir les portes de son établissement. L’appui d’intermédiaires, experts de l’art contemporain, directeurs de centres d’art ou entreprises de conseil art et management peuvent également contribuer à donner des repères et une certaine forme de garantie au chef d’entreprise dans la pertinence de son choix s’il en ressent le besoin.

Une nécessaire rencontre entre deux désirs

Ces critères « rationnels » d’appréciation ne sont pourtant pas suffisants. L’immersion d’un artiste au sein d’une entreprise ne peut avoir lieu que dans la rencontre entre deux curiosités, deux désirs d’ouverture, de questionnement, d’étonnement. Quel que soit l’intermédiaire, le cursus de l’artiste ou la renommée de l’entreprise, une immersion n’est possible que si cette rencontre a lieu.

Ce désir de travailler et de créer en relation avec des entreprises privées ou publiques, des administrations, des associations est avéré chez les artistes. Les motive tant le souhait de travailler en relation avec la société, de se confronter au réel et à autrui que de vivre de leur pratique.

Les expériences ne sont pas si rares, même dans notre région. A la faveur de l’atelier-formation que j’ai initié en octobre dernier avec Hélène Mugnier, consultante Art& Management, huit artistes nous ont ainsi rejoints pour partager leurs questions mais aussi leurs expériences. De portraits de commande réalisés pour une étude de notaires à la co-réalisation de boîtes à musique avec les déchets d’une entreprise de cartonnage en passant par un tournage avec les motards du Tour de France dans un studio de la SFP, les expériences de partenariat avec le monde de l’entreprise ne manquent pas. Nous relevons cependant que pour chacun des participants présents autour de la table un flou quant à leur statut est apparu dans cette relation : étaient-ils exécutants, artisans ou artistes ? Les choses bien souvent n’avaient pas été posées clairement au début de la relation, engendrant ensuite pour l’artiste des compromis qui pour certains les empêchent aujourd’hui de valoriser le travail accompli.

Une œuvre créée au sein d’une entreprise peut-elle s’en abstraire ?

La question du statut d’une œuvre réalisée par l’artiste en immersion se pose. Dans la mesure où elle a été réalisée au sein d’une organisation et où elle implique des personnes qui y travaillent, ceux-ci en deviennent-ils ses coauteurs ? Est-elle une œuvre collective divulguée sous le nom de l’artiste ? L’œuvre peut-elle avoir une existence propre au-delà de la période d’immersion, éventuellement être vendue, circuler sur le marché, devenir un objet d’art ?

Dans le cadre d’expériences clairement affirmées comme des interventions d’artistes en entreprise relatées lors des rencontres-discussions OPA d’octobre, les artistes d’Interim ont présenté les traces de leurs actions, diaporamas et films, objets fluides destinés à montrer l’éphémère pour partager l’expérience. Marie Reinert, en résidence aux Archives départementales d’Ille et Vilaine dans le cadre de la Biennale de Rennes, nous a présenté le film qu’elle y a réalisé en partenariat avec un ergonome du travail et dans lequel sont impliqués les salariés des archives. Ce film existe sous forme d’installation, les conditions pour le montrer impliquent un dispositif particulier, c’est une œuvre qui peut circuler, être installée et montrée dans un espace muséographique. Une œuvre qui fait sens et affirme son caractère fictionnel lorsqu’elle est abstraite de son contexte.

Redonner aux acteurs le choix d’être un public, replacer les œuvres dans le contexte de l’art

Que l’artiste immergé produise des formes immatérielles ou matérielles, que seules subsistent des traces de son action ou qu’apparaissent des formes pérennes, il me semble important que soit prévue une monstration du travail réalisé dans un lieu d’art. L’objectif en est valoriser le travail de l’artiste, non seulement pour lui mais aussi pour l’entreprise et ses salariés qui auront côtoyé, voire participé à la réalisation de son travail. En réintégrant les productions de l’artiste dans le contexte habituel d’exposition des œuvres, on opère un aller-retour entre les mondes de l’art et de l’entreprise. On permet au salarié de choisir d’aller ou non vers l’œuvre qui a été/s’est produite au sein de son entreprise, d’agir en « spectateur émancipé ».

A côté de la mise en place d’un système, tel qu’OPA, la solution pour créer une forme d’évidence sur la présence de l’artiste au sein des organisations ne résiderait-elle pas dans le choix par des institutions artistiques d’exposer ce type d’expériences artistiques ? Dans le choix par des galeristes de défendre des artistes travaillant dans ce sens ? C’est en multipliant les immersions en entreprise et en leur donnant une visibilité dans le champ de l’art qu’émergera et s’affirmera un art pertinent dans sa relation à l’entreprise, en tant que forme esthétique à même d’introduire un étonnement dans l’espace de l’expérience commune.

Revue de presse (s.47)

Sur la désillusion face à l’exercice du travail salarié : prendre le risque de partir ou celui de rester ?

Extraits.

« Plus que jamais, il faut que les salariés acceptent de jouer le jeu d’un engagement très fort, d’un investissement dans compter ou presque dans l’entreprise. Pour que cette dernière dans la course, c’est la posture du « tous sur le pont » [Eugène Enriquez, 1997] qui s’impose. Or voilà justement que l’engagement des salariés vacille.

[…]

Hier individus au destin écrit à la naissance ou presque […], ils sont aujourd’hui des individus contemporains plus libres mais aussi sommés de « s’inventer » [Jean-Claude Kaufmann, 2004], de trouver qui ils sont et plus encore de réussir leur vie. Un travail de construction identitaire difficile, « fatigant » [Alain Ehrenberg, 1998] qui dure tout au long de la vie et dans lequel le travail continue de tenir une grande place.
Dès lors, ces hommes et ces femmes opèrent constamment des calculs dans leur relation à l’emploi : oui à un engagement fort dans mon travail si celui-ci s’avère payant en terme d’estime de moi et de construction identitaire. Dans le cas contraire, la tentation du retrait n’est pas loin. Ce retrait peut se manifester de plusieurs manières. Certains optent pour des solutions extrêmes, décidant de tout plaquer et de « changer de vie. »

[…]

Mais ne nous trompons pas, ce retrait complet, total de la grande organisation n’est pas le plus courant. Renoncer à un revenu régulier […] n’est pas à la portée de tous.

[…]

Non, pour le plus grand nombre, le retrait se vit de l’intérieur. Être désengagé tout en restant dedans. Faire « comme si » mais ne plus y croire.

[…]

Ces « retirés » se font discrets (…), sans bruit, se débrouillent pour ne pas se retrouver sur les projets les plus prenants, les plus exigeants. Ils s’arrangent pour ne pas être mutés. Rester là où ils sont le plus tranquillement possible. Le désengagement professionnel de ces individus ne signifie pas qu’ils ne font pas correctement leur travail (cela se verrait) mais plutôt qu’ils sont sans illusions ni aspirations trop importante quant à leur avenir professionnel. Ils sont là. Ils restent là. Leur devise pourrait être : « Ne pas faire de vagues ».

[…]

Heureux ou aigris, l’existence de ces désengagés de l’intérieur ne peut à terme rester sans effet sur la performance et de dynamisme des organisations. »

In Des salariés désengagés de l’intérieur, J. Ghiulamila, Les Grands Dossiers des Sciences Humaines n°12, Septembre-Octobre-Novembre 2008, p.48-49

Revue de presse (s.46)

Sur la souffrance au travail et les stratégies adoptées par les salariés pour s’en sortir.

Extrait.

« Une contrainte économique qui augmente le stress, un management pathogène, une autonomie épuisante, des relations avec le public plus tendues, etc., les cause de la souffrance au travail sont nombreuses. On peut d’ailleurs en trouver d’autres : le stress technologique et informationnel – celui des courriels et du téléphone portable – le manque de reconnaissance, la perte de sens, sans oublier le lancinant sentiment d’injustice.

Face au mal-être, aux mécontentements que l’on éprouve dans sa vie quotidienne, que faire ? La psychologie du coping nous enseigne que l’individu peut réagir aux frustrations de deux manières : fight or flight (fuir ou affronter la situation).

[…]

La fuite peut prendre la forme de la démission et du choix d’un autre travail ou d’une autre vie.

[…]

La défection peut prendre une forme moins héroïque. Désabusés par leur poste, certains décrochent mais sans prendre le risque de quitter leur emploi, leur entreprise ou leur administration. Ce sont les « désengagés de l’intérieur » , qui cultivent l’apathie morbide ou une forme de cynisme.

[…]

Une autre stratégie est celle de la confrontation. Plusieurs sociologues en appellent aujourd’hui à la résistance. Pour eux, le thème de la souffrance et de son traitement psychologique empêche une formulation sociale des problèmes et une canalisation collective des mécontentements. En somme, il faut reprendre la lutte, celle-ci pouvant être une pure logique de résistance ou au contraire prendre une forme plus créative de contre-projets.

Une autre voie consiste enfin à recourir à toute la gamme des stratégies d’adaptation : de la gestion du stress (relaxation, yoga) aux multiples techniques de gestion du temps, de la conduite de réunion, de la communication, de la gestion des conflits et de toute autre forme de coaching visant à remotiver et réenchanter le travail »

In Le blues du dimanche soir, J.-F. Dortier, Les Grands Dossiers des Sciences Humaines n°12, Septembre-octobre-novembre 2008, p.29

Revue de presse (s.37)

Article publié “A la une” sur FocusRH, entretien avec Eric Seuilliet, consultant, fondateur du cabinet de conseil e-Mergences.

Extraits.

« Longtemps éloignés des acteurs économiques, les créateurs contemporains deviennent aujourd’hui des consultants à part entière. Ils interviennent au niveau de l’innovation produit mais également au niveau de l’approche RH. »

« Les artistes, grâce à leur sensibilité, s’imprègnent de leur environnement et deviennent des capteurs d’informations, de véritables moteurs de recherche, des catalyseurs d’idées. »

In Les artistes infiltrent l’entreprise, C. Lambolez, FocusRH, 7 mars 2007

16, 17 et 18 OCTOBRE 2008 • QUAND L’ART FAIT DE L’ENTREPRISE SA MATIÈRE

3 JOURNEES DE RENCONTRES ET DE REFLEXION •
3 PROJETS ASSOCIANT LE MONDE DE L’ART ET DE L’ENTREPRISE :
OPA • DISPERSION CONTRÔLEE • ATELIERS DE RENNES •

Quand l’art fait de l’entreprise sa matière

Qu’est-ce que l’artiste vient faire dans l’entreprise ?

Dix mois après le lancement du programme OPA • Offre Publique d’Art, le Syndicat Potentiel organise trois journées de rencontres avec des artistes plasticiens et des responsables d’organisations qui ont fait le choix de faire se rencontrer leurs univers et pratiques.

A leurs côtés, des membres du groupe de réflexion, professionnels du monde de l’art et de l’entreprise, mettront en perspective ces expériences singulières dans le champ élargi des expériences associant ces deux secteurs d’activité.

Partage d’expérience, dialogue entre acteurs concernés et avec le public intéressé pour tenter de dresser un premier bilan de l’action et de répondre à ces questions récurrentes :

Pourquoi OPA propose à des organisations de devenir une «matière» de création ?
Qu’ont produit les artistes dans leurs entreprises d’immersion ?
Pourquoi un cabinet d’architectes a-t-il accepté de donner carte blanche à une artiste ?
Quelles étaient les motivations du comité d’entreprise d’Arte GEIE pour faire intervenir des artistes en relation avec les salariés ?
Quelles surprises ont réservé les deux immersions OPA chez Arte GEIE et GStudio ?
Qu’ont retenu les artistes de leurs séjours en entreprise ?

L’infiltration de l’art dans le monde de l’entreprise est un sujet d’actualité. Les immersions OPA ne se proposent ni de décorer un couloir ni d’accroître la productivité mais de partager un processus de création à même de produire du sens et de l’étonnement dans l’espace de l’expérience commune.

Quelles sont les questions posées, les perspectives ouvertes par cette approche singulière ?

Programme

Jeudi 16 octobre

13h00 - Accueil par le Syndicat Potentiel
13h15-15h00 - Conférence d’ouverture
OPA, présentation, réalisations et enjeux par Catherine Gier (chef de projet OPA).
18h00-20h00 -Rencontre-discussion
OPA - Immersion de Marie Bouts chez ARTE GEIE avec Marie Bouts (artiste), Hélène Mugnier (conseil art et management, membre du groupe de réflexion OPA), Laurence Stutzmann (chargée de mission RH et Organisation, ARTE GEIE), Jean-Philippe Beinert (président de la CCLOS du Comité d’entreprise d’ARTE GEIE).
20h00 - Projections
Interim [Dispersion contrôlée], David Zurmely, documentaire, 26’
Tirer sur la corde [un jeu de l’oie], Catherine Gier, 19’
Faire, Marie Reinert, 13’

Vendredi 17 octobre

9h00-12h00 - Atelier-formation
Etude de projets d’artistes en relation avec le monde économique : faisabilité, conseils, partage d’expériences. Animé par Catherine Gier et Hélène Mugnier, (sur inscription et envoi d’une présentation du projet sur une page A4 maximum, limité à 12 participants).
13h00-15h00 -Rencontre-discussion
Dispersion contrôlée [une semaine de ruche en réseau], intervention d’Interim-équipe d’artistes chez ARTE GEIE en présence de Céline Ahond, Marie Bouts, Julien Celdran, Lou Galopa, Catherine Gier, Séverine Hubard, Alice Retorré, Till Roeskens, présentée et animée par Olivier Grasser (directeur du FRAC Alsace, membre du groupe de réflexion OPA).
16h00-17h30 - Rencontre-discussion
Les Ateliers de Rennes - Séjour de recherche et de création en entreprise de Marie Reinert au Conseil Général d’Ille et Vilaine avec Marie Reinert (artiste).
18h00-20h00 - Rencontre-discussion
OPA - Immersion de Julie Vayssière chez GSTUDIO avec Julie Vayssière (artiste), Paul Ardenne (critique d’art, membre du groupe de réflexion OPA), Olivier Greder (architecte, GStudio), Michaël Osswald (architecte, GStudio), Emmanuelle Rombach (GStudio).

Samedi 18 octobre

13h30-18h00 - Immersion-visite
OPA – Immersion de Julie Vayssière chez GSTUDIO, découverte des lieux d’immersion de l’artiste à Strasbourg et Sainte-Croix-aux Mines, en compagnie de l’artiste et de membres de GStudio (sur inscription).
18h00-19h00 - Promenade
Sainte-Croix-aux-Mines et autour, balade sur une proposition de l’artiste (sur inscription).
19h30-… Repas-Projection
Occupation maximale de la maison G070 à Sainte-Croix-aux-Mines, 10 rue des Coccinelles.

Informations pratiques

Quand ? 16, 17 et 18 octobre 2008

Où ? Ouverture au public le 16 octobre à 13h00 à la Maison des associations, 1a place des Orphelins à Strasbourg. Entrée libre.

Inscriptions atelier-formation du 17 octobre et journée du 18 octobre ? 03 88 37 08 72 ou catherine.gier[arobase]action-opa.fr

Olivier Greder : Un projet social de développement humain partagé au sein de l’entreprise.

Ce qui m’intéresse dans le projet OPA, c’est son potentiel à pouvoir générer des richesses non-utilitaristes.
L’immersion d’un artiste rémunéré dans l’entreprise selon les principes du projet OPA, ne vise pas la stimulation de la technocratie managériale, ni la production d’une œuvre pour la collection de ses dirigeants.
La cause est ailleurs.
Miser sur la fertilité que des rencontres entre des personnes d’imprégnation culturelle différente peuvent produire et faire de cette richesse un projet social de développement humain partagé au sein de l’entreprise, est ce qui me parait manifeste dans ce projet.
L’immersion d’un artiste dans l’entreprise selon les principes du projet OPA, c’est de la communication au sens actif ; quand des échanges intéressants sont possibles du fait des différences.
Il n’y a pas d’accord nouveau réel possible sans désaccord initial.
Le régime de l’obsession consensuelle et de la pseudo harmonie, entraîne l’abandon, voir le rejet de toute attitude ou forme de critique.
L’application globale du phénomène aboutit à la spoliation de la multiplicité des opinions et croyances au profit de la raison ambiante, tautologique.
Pour permettre d’arriver à un consensus, il faut très souvent sacrifier ses réticences, ou tout du moins les taire un moment pour simuler l’accord ; toute attitude critique est fort mal venue.
Le projet OPA réintroduit l’expérience courageuse de la confrontation. Etre au cœur de la fragilité, avoir la possibilité de faillir font partie intégrante de l’expérimentation. Le projet OPA permettrait de dépasser les consensus stériles et de refuser les échanges non dialogiques.
L’idée d’expérimenter une œuvre relationnelle sans contrepartie de valorisation conventionnelle au cœur de la fabrication des plus-values économiques, est une sorte d’exagération sûrement porteuse.
L’accord trouvé avec l’entreprise pour convenir de l’immersion d’un artiste dans les conditions du projet OPA, ne naît-il pas d’un décalage si grand au départ qu’il ferait advenir une sorte de compatibilité à l’endroit de logiques inconciliables ?

Revue de presse (s.28) : Surpris par la nuit, France Culture.

Emission du mardi 8 juillet 2008
En revenant de l’expo

Par Elisabeth Couturier
Réalisation : Anna Szmuc

EVENEMENT
L’artiste IGOR ANTIC pour son exposition au sein de l’entreprise Eurogroup réalisée après trois mois de résidence passée au sein du groupe de conseil n°1 en Europe. Il est accompagné des deux commissaires, Julien EYMERIE et Clément DIRIE. Exposition à partir du 20 juin 2008 et sur rendez-vous.